Sigmar Polke

Sous les pavés, la terre

sam. 1 mars – 26 oct. 2025

Pour cette exposition majeure dédiée à Sigmar Polke (1941–2010), figure artistique incontournable du xxe siècle, nous avons rassemblé peintures, photographies, estampes, sculptures et films, afin de mettre en lumière l’audace d’un artiste animé par un humour incisif et un goût pour l’expérimentation, nourris par un regard toujours critique sur son époque.

Le titre de l’exposition, « Sous les pavés, la terre », évoque l’élan de liberté et de contestation de Mai 68 qui a marqué les premières œuvres de Polke, mais souligne aussi un ancrage solide dans la réalité – présent dans l’art du peintre allemand comme dans celui de Vincent van Gogh.

Commissariat : Bice Curiger, assistée de Margaux Bonopera

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Les pièces sélectionnées datent de 1963 à 2009 et mettent l’accent sur le médium peinture avec lequel l’artiste, explorant l’idée d’une nouvelle beauté au-delà des conventions, exprime des vérités sur notre monde. Polke a en effet toujours été un analyste précis et un commentateur aguerri de son temps. En France, la réception de son œuvre est devenue significative à partir du début des années 1980. Avant que Suzanne Pagé en présente une grande rétrospective au Musée d’art moderne de la Ville de Paris en 1988, la galerie Bama / Chantal Crousel avait déjà exposé le travail de Polke, et en 1984, Bice Curiger avait réalisé avec lui un long entretien pour la revue française Art Press, au cours duquel les allusions à l’histoire franco-allemande avaient été nombreuses.

Sigmar Polke s’est très tôt intéressé aux images des médias imprimés, à leur impact sur le public, à leur circulation et à leur lisibilité. Au début de sa carrière artistique en 1963, à l’âge de 22 ans, il crée avec Gerhard Richter le « réalisme capitaliste », également connu sous le nom de pop art allemand, comme une réponse aux dictats en vigueur en République démocratique allemande. L’économie croissante de la République fédérale d’Allemagne d’après-guerre et son idylle bourgeoise engendrent alors de nouveaux univers visuels marqués par la consommation, la publicité et les magazines, que Polke intègre dans ses œuvres de manière ludique et clairvoyante.

La rencontre entre Van Gogh et Polke à la Fondation Vincent van Gogh Arles révèle des liens inattendus et pourtant évidents, notamment via le motif de la pomme de terre. Pour Vincent, ce tubercule est le symbole du lien à la terre nourrissante, du labeur des paysans et du repas des pauvres, tandis que chez Sigmar, la pomme de terre symbolise le quotidien allemand « antiglamour » d’après-guerre, opposé au pop art américain coloré qui glorifie le nouveau monde de la consommation. Aussi différents que Van Gogh et Polke puissent apparaître, ils ont en commun un tempérament positif, empreint d’un profond humanisme, ainsi que le désir d’échapper aux normes de l’art dominant.

Le titre de l’exposition « Sous les pavés, la terre » fait référence à l’énergie du changement de Mai 68 qui anime les premières œuvres de Polke, mais évoque aussi un fort ancrage dans le réel qu’on retrouve chez l’artiste allemand comme chez Van Gogh. Les deux tableaux du peintre néerlandais qui accompagneront les œuvres de Polke en témoignent : Travail des champs (avril 1885) et Panier de pommes de terre (septembre 1885).

L’exposition montre l’évolution apparemment erratique, et pourtant si ample et cohérente, de l’œuvre de Polke, qui attire et inspire les jeunes artistes d’aujourd’hui. Elle présente d’une part les célèbres œuvres des années 1960 utilisant les points de trame des images de journaux, mais aussi des aquarelles et des tableaux comme Reiherbild II (Image de hérons II, 1968), dont la virtuosité du trait – sorte de fétiche formel – est tournée en dérision.

Sigmar Polke a ainsi déconstruit très tôt le processus de peinture classique. Son support n’est généralement pas une toile, mais un tissu industriel imprimé ou encore un rideau en voilage… S’il passe beaucoup de temps à transposer à la main, point par point, une photographie de presse, il aime aussi verser généreusement de la peinture liquide en grandes éclaboussures et en rires qui s’étendent. Créant des formes qui fixent durablement l’imprévu, l’aléatoire, l’instant.

Depuis le début des années 1960, Polke a également pratiqué la photographie. L’exposition permet de comprendre à quel point ce médium a influencé sa pratique picturale – et inversement. Une série de photographies des années 1960-1970 encore jamais exposée est à découvrir aux côtés d’importants ensembles de tirages photographies uniques comme Paris 1971 ou Palermo, Les Catacombes.

Des exemples significatifs de la série de tableaux consacrée au thème de la Révolution française viendront enrichir le parcours des visiteur·ses.

L’agilité mentale et l’expérimentation matérielle sont caractéristiques de Sigmar Polke. L’ensemble de son œuvre témoigne d’un amour incomparable de la liberté – tant personnelle qu’artistique –, qui ne contrevient jamais à sa foi puissante en la force communicative de l’art.

Notre exposition souhaite rendre accessible au grand public et aux jeunes générations le travail de ce précurseur, qui n’a pas été montré en France depuis longtemps.

 

Galerie d’images

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Sigmar Polke. DR

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Sigmar Polke Estampe et révolution, 200 ans après, 1989 Lithographie et sérigraphie en couleur sur papier vélin d’Arches, 60,5 × 85 cm Collection Hesta AG, Suisse

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Sigmar Polke Reiherbild II (Image de hérons II), 1968 Dispersion sur flanelle à motifs, 190 × 150 cm Collection particulière

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Sigmar Polke Flüchtende (Fugitifs), 1992 Acrylique et résine sur tissu, 225 × 300 cm Carré d’Art, musée d’art contemporain de Nîmes

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Sigmar Polke Sans titre (Pilzbild) [Image de champignon], 1975 Photoemulsion, acrylique et peinture en aérosol sur toile, 40 × 50 cm Collection particulière

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Sigmar Polke Sans titre (Schuldruck) [Imprimé scolaire], 1972 Sérigraphie, paillettes, gaufrage et découpe à l’emporte-pièce sur carton Bristol, 50 × 65 cm Édition 191/250 Collection particulière, Berlin

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Vincent van Gogh (1853-1890) Travail des champs, Nuenen (Pays-Bas), avril 1885 Huile sur toile, 33 × 41 cm Kunsthaus Zürich, 1927

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Sigmar Polke, Vitraux de l'église Grossmünster, Zurich. DR

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Sigmar Polke Die Schmiede (La Forge), 1975 Acrylique et peinture métallique sur coton, 150 × 130,4 cm Collection Arora, Londres

Infos pratiques

Vernissage : vendredi 28 février, 18h30