Urs Fischer
« Mon cher... »
L’exposition d’envergure consacrée à Urs Fischer, né en 1973 à Zurich, sera dévoilée au public le 1er octobre 2016. « Mon cher… » se tiendra à la Fondation Vincent van Gogh Arles pendant quatre mois et entend offrir un panorama des productions d’Urs Fischer postérieures à 2013 : sculptures monumentales et de format plus intime, peintures sur aluminium et papiers peints, le tout à travers un parcours dynamique impliquant le mouvement du visiteur.
Au-delà de la puissance d’organisation de l’espace, que démontre entre autres le déluge de gouttes d’eau colorées et surdimensionnées de l’installation Melodrama (2013) sur plus de 400 m2, la singularité de cette exposition tient au simple fait que la totalité des espaces du musée sont consacrés à ce seul artiste. Généreuses, ironiques et suscitant l’empathie, ses œuvres ponctuent un parcours qui se propage jusqu’aux salles les plus atypiques, tels la cour extérieure ou un cabinet orné de boiseries. Parmi elles figure aussi Sous-bois (1889) de Vincent van Gogh, le prêt annuel en provenance du musée Van Gogh d’Amsterdam.
Le travail d’Urs Fischer est marqué par une extraordinaire tension entre, d’une part, les notions d’individualité et de collectif, et, d’autre part, l’évocation de formats sculpturaux traditionnels et la production d’œuvres en deux dimensions à l’ère postdigitale. Cette oscillation entre deux pôles entraîne parfois leur imbrication, si bien que le simulacre visuel, normalement associé à la photographie, affecte aussi le médium de la sculpture.
Devant last supper (2014), le doute s’installe quant au matériau utilisé. L’aspect de cette sculpture de plus de sept mètres de long est propre au modelage de l’argile ; il révèle l’effort collectif sollicité pour façonner l’œuvre initiale, présentée au musée d’Art contemporain de Los Angeles (MOCA) en 2013. L’argile est devenue bronze dans un processus d’anoblissement qui a cependant gardé les traces de la genèse de la sculpture et les empreintes de chaque participant. Les mêmes glissements semblent s’opérer pour les huit sculptures en bronze moulé de femmes allongées. Ne convoquent-elles pas l’idée d’un atelier collectif de modelage d’une académie des beaux-arts qu’auraient délaissé modèles et étudiants ? De vivant, il ne resterait alors que la production qui semble s’éprouver encore, le non finito d’œuvres ancrées dans le passé et tournées vers un devenir. Face à la « subjectivité collective » insufflée dans ces sculptures marquées par une matérialité sensuelle et archaïque, répondent des images placées sous les signes de l’hyperréalité et de l’autoportrait. Ces tableaux sur aluminium, dont Barium (2016), représentent une partie du corps de l’artiste (oreille ou œil) encerclée par des couches de peinture de couleur sérigraphiées à l’effet trompeur d’empâtement.
La référence à Van Gogh se tisse, non seulement à travers le titre de l’exposition, mais aussi au gré des œuvres exposées, convoquant tantôt l’émotion du relief, l’affirmation de la couleur hautement étudiée ou l’ambivalence contenue dans l’autoportrait.